Les vibrations cosmiques de la scène psychédélique/doom/stoner des contrées italiennes retentissent dans le monde de l'émergeance et l'évolution des siciliens d'Ufomammut ces vingt dernières années. Par la suite, on peut mentionner Messa, qui a cautérisé le néant et les ruines intérieures grâce à ses oeuvres imbibées de la magie noire qu'a initialement employé Black Sabbath. En 2024, les disciples italiens des fumées sacrificielles ont accouché leurs visions, tels que Black Capricorn, Black Spell, et justement Ufomammut. C'est aussi le cas de Haunted avec "Stare at Nothing", qui par les chants éthérés de Cristina Chimirri nous conte les hantises des spectres errants sur nos sols désolés, connus par la transmission de ceux-ci dans les entrailles du manifesté...
Forts de deux solides albums respectivement sortis en 2016 et 2018 chez Twin Earth Records, c'est par un écart de six ans que la formation sicilienne, le temps de consulter ses grimoires, resurgit en avril sous couverture des californiens de Ripple Records (The Necromancers, Wo Fat...). Comme sur les deux opus précédents, "Stare at Nothing" est produit par Carlo Longo et est mît en boite en juin 2023. La formule se définit par un style très proche de Windhand, caractérisé par un stoner saisissant, langoureux, au son épais et rampant, provenant d'Electric Wizard, avec l'éclat, l'originalité d'une voix féminine. L'illustration incolore, décharnée, floue, dépeint la poésie funeste de Haunted, où l'âme "jetée" inéluctablement sur les horizons de l'existence, vient à contempler le vide pourtant à l'origine de sa mobilité, ce vide qui n'est autre que la volonté aveugle, prospectant infatigablement la conservation paradoxale, car située dans les lieux de l'éphémère... Le vouloir-vivre n'est que le néant, la chimère de la vie, désormais constaté par l'âme désillusionnée, avachie sur les simulacres de l'ignorance, ses yeux subtils éblouis par l'obscurité. C'est du moins ainsi que s'articule notre humble interprétation de la chose.Le
préambule de "Stare at Nothing" orchestre artistiquement les murmures
des cauchemars de la somme des atterrés... lequel permet l'ouverture de
"Catamorph", aux riffs boueux et lancinants. "Garden of Evil" poursuit
la messe noire sur le même tempo, avec les superbes harmonies vocales de
Chimirri, et le solo de Kim Crowley. "Back to the Nest" enchaîne sur
une rythmique plus apocalyptique accompagnée d'un ton plus bluesy. Le
progressif "Malevolent" abrite une interlude atmosphérique, similaire au
repos de "Fall of the Seven Veils", avant la consécration finale de
l'impeccable duo "Stare at Nothing" et "Waratah Blossom". Globalement,
l'album possède une aura très proche de ce qu'on réalisé les sardes de
1782, les anglais de With the Dead et de Dead Witches, avec les
vocalises à la fois douces et tragiques de Chimirri. Cette dernière a
par ailleurs selon nous un registre vocal assez monotone au bout d'une
écoute prolongée. L'acheminement du titre "Waratah Blossom" rappelle
"Dopethrone" d'Electric Wizard, avec un coda comportant une excellente
verve identique. Le batteur Luca Strano doit beaucoup à la façon de
jouer de Mark Greening, anciennement membre d'Electric Wizard.
Sans être transcendant, "Stare at Nothing" confirme la position d'Haunted en tant qu'intéressant passeur de la sensibilité très reconnue du fameux sorcier électrique, lequel ayant totalement transformé le paysage doom/stoner au tournant du XXIème siècle. Doté également d'un patte très grunge, au souffle parallèle à Alice in Chains, les siciliens raviront les fans de stoner/doom, dû à un style bien maîtrisé, traversant les années 90 et 2000.
7/10
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| De gauche à droite : Kim Crowley, Frank Tudisco, Cristina Chimirri, Luca Strano. |



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